Par Sophie Bigot-Goldblum

Je ne voudrais inquiéter personne, mais Pessah’ approche à grands pas!

Cette année encore, un certain nombre d’entre nous va devoir prendre les rennes et diriger un seder, d’habitude orchestré d’une main de maître par un ou une habituée.

Pas d’inquiétude : le net regorge désormais de kit-de-pessah clef en main comme cet excellent exemple.

Bien souvent, cependant, les informations  disponibles sur la toile proviennent de sites anglophones, et reflètent les coutumes des juifs ashkénazes.

Or, l’une des richesses de Pessah, c’est que, plus qu’aucune fête, le seder recèle des coutumes qui varient de villages en villages, de familles en familles. Le recours à internet place la mise en pratique des rituels à la portée de tous – tout en les uniformisant.

Alors cette année, pourquoi ne pas mettre à l’honneur les coutumes des juifs séfarades et nords-africains? Si comme moi, vous préférez retourner en Egypte à reprendre du Gefilte Fish, suivez le guide:

  • Charosset : Pour ce symbole du mortier que fabriquaient nos ancêtres, on oublie les pommes gala, qui de toute façon, ne sont pas de saison en plein mois de Nissan -et on remplace par des dattes bien juteuses, auxquelles on ajoute des figues séchées, des cerneaux de noix, et quelques gouttes d’eau de fleur d’oranger-. Et on n’oublie pas de parsemer le tout de pétales de roses séchées. C’est Pessah’ ou c’est pas Pessah’?
  • Les kitniots . Voilà  peut-être la différence la plus célèbre entre le Pessah des séfarades et celui des ashkénazes. Ces légumineuses ne font pas partie des 5 graines dont la consommation, une fois fermentées, est proscrite. Pour rappel, seuls le blé, l’orge, le seigle, l’épeautre et l’avoine sont prohibés. Cependant, les ashkénazes ont pour coutume de s’abstenir également de manger des lentilles, du riz, du maïs etc…  Mais pourquoi d’ailleurs ? Il y a plusieurs raisons à cette coutume. L’une d’elles est pratique: en utilisant d’autres farines, on pourrait constituer des mets qui ressemblent à s’y méprendre à ceux justement interdits à Pessah’ : une idée qu’on trouve déjà dans le Talmud L’autre raison de cette prohibition est plus historique. Avant l’industrialisation de l’agriculture, ces produits étaient souvent produits et entreposés ensemble, menant à des mélanges de graines. Cela, bien sûr, devenait très problématique lors de la pâque juive, où la simple possession de chametz était interdite. Même si ces mélanges n’ont plus cours de nos jours, certains ashkénazes ont maintenu la coutume de ne pas manger de légumineuses à Pessah. La plupart des séfarades eux, ne s’en privent pas – sauf les Marocains, qui s’abstiennent de riz.
  • Les brachots sur le vin: Chez les séfarades, on fait deux bénédictions sur le vin (al hagefen) plutôt que quatre chez les ashkénazes. Une pour kiddush, et une pour le birkat hamazon, à la fin du repas. Mais moins de bénédictions ne veut pas dire moins de boisson!
  • Le plat du seder : Peut être avez vous déjà été témoins d’une coutume nord-africaine (principalement tunisienne) consistant à  faire tourner le plat du seder au dessus de la tête de chaque invité, en mémoire de l’ange de la mort qui passa (pessah’) au dessus des maisons des Hébreux, leur évitant la mort tragique des nouveaux nés. D’autres rapportent que cela symbolise les fardeaux que nos ancêtres portaient sur leurs têtes lorsqu’ils étaient esclaves en Egypte. Un rituel qui exige une certaine dextérité : à pratiquer avant la consommation des quatre coupes de vin.
  • Sonotono: un sandwich de matsa au beurre et au miel. Bon, les séfarades ne peuvent pas être meilleurs tout le temps…
  • La mimouna! Une célébration qui vient clore la fête de Pessah, et qui mérite un article à elle toute seule… On vous en reparle bientôt!

Ce tour d’horizon, bien trop bref, n’épuise pas la richesse des coutumes séfarades à Pessah. Pour enrichir votre seder, le mieux est encore, comme nous y invite justement la tradition de Pessah’, de se tourner vers vos anciens et de poser des questions. Ma Nishtana ? Qu’est ce qui est différent, cette nuit, dans notre tradition du seder, de tous les autres seders?