par Tzuri Hason, adapté de l’article original en hébreu sur Jeducation World.

 

En tant qu’éducateur et parent, je me demande souvent comment traiter les enfants plus «difficiles», ces enfants qui ne suivent pas nécessairement les projets et les valeurs que nous espérions engendrer en eux. Au contraire, ces enfants peuvent avoir des habitudes et des comportements que nous aimerions voir affinés ou, dans les cas les plus graves, complètement modifiés. Comment devrions-nous, en tant qu’éducateurs, nous comporter dans de telles situations?

 

Devrions-nous leur montrer un amour inconditionnel, leur faire savoir que nous ne renoncerons jamais à eux? Devrions-nous nous éloigner d’eux, en ignorant ces problèmes afin de nous sauver de la frustration et de conserver nos ressources mentales? Devrions-nous essayer de combiner les deux approches, avec à la fois l’amour et la réprimande? Il semble que la Torah souhaite que nous adoptions cette approche, comme il est dit, «Car Dieu châtie celui qu’il aime, Comme un père l’enfant qu’il chérit.». (Proverbes 3:12) Malheureusement, cette approche peut être la plus difficile à mettre en œuvre.

 

En fait, nous avons également été exposés à ce problème précis dans une récente lecture de paracha. Ésaü, le fils de Rebecca et d’Isaac, est un chasseur, un homme fougueux et matérialiste qui épouse une cananéenne contre la volonté de ses parents. C’est le cas, au moins, selon le pshat, une lecture littérale de la Torah. Les midrashim continuent en fait à peindre Ésaü plus tard, le montrant comme un voleur, un violeur et un meurtrier. De toute évidence, on peut dire qu’il n’a pas suivi les traces de son père, un homme qui marchait sur le chemin droit de Dieu et était prêt à se sacrifier sur un autel. Nous ne pouvons pas non plus le comparer positivement à l’image gracieuse de sa mère qui avait une relation prophétique étroite avec Dieu.

 

La Torah nous peindra certainement la différence entre les frères Jacob et Esaü, et leur relation avec leurs parents: «Ces enfants grandirent. Ésaü devint un habile chasseur, un homme des champs; mais Jacob fut un homme tranquille, qui restait sous les tentes. Isaac aimait Ésaü, parce qu’il mangeait du gibier; et Rebecca aimait Jacob.” (Genèse 25: 27-28.) Cependant, il ressort également clairement de la suite de l’histoire qu’Isaac aimait aussi Jacob, qui suivit ses traces. (D’ailleurs: je pense qu’il est juste de dire que Rebecca aimait également Ésaü de la même manière, mais qu’elle a choisi d’investir son énergie sur l’enfant qui montrait qu’il suivrait leur chemin.) Pourtant, il était important pour Isaac d’aimer Ésaü, et cet amour est à souligner. Il est probable qu’Isaac ait cru qu’en aimant son fils, ce dernier pouvait être amené à faire le bien. Même lorsque son fils a épousé une Cananéenne, un événement dont la Torah enseigne qu’il a causé une grande douleur, il ne l’a pas réprimandé.

 

Le Sforno, l’un des principaux commentateurs de la Torah, semble interpréter cela comme une énorme erreur, en ce que l’influence d’Isaac sur Ésaü était suffisamment grande pour qu’il ait accepté une réprimande de son père, déclarant «Isaac aurait pu protester contre Esaü quand il a épousé des femmes de Canaan, s’il voulait y mettre tout son cœur.” (Commentaire sur Genèse 28: 8) Au début, je croyais que le Sforno était assez critique envers Isaac et son choix, mais, au deuxième coup d’œil, j’en suis venu à comprendre qu’il appréciait en fait sa méthode, et dit en fait: «Isaac, tu étais un homme si bon que tu as même réussi à créer une relation si spéciale avec un grand fauteur, tu as trouvé en lui du potentiel alors que d’autres avaient déjà abandonné. Pourtant, pourquoi n’avez-vous pas utilisé tout ce que vous pouviez pour l’incliner dans une autre direction? » Il demande: pourquoi Isaac ne ferait-il pas tout ce qu’il pouvait pour réprimander son fils, alors qu’il était le seul à pouvoir le faire?

 

La Torah, contrairement aux récits et contes populaires d’autres cultures et religions, ne nous donne pas des chiffres parfaits. Au contraire, elle nous parle de figures puissantes mais humaines. Elle nous montre des personnages exemplaires, qui étaient si proches de la «perfection», mais qui avaient des défauts que nous pourrions appliquer à nos propres vies. Et, je crois que la leçon que nous pouvons tirer de cette histoire, c’est que nous ne devons abandonner aucun enfant. Il faut les aimer, les garder proches, mais aussi, très doucement, savoir marquer les limites et les réprimander si nécessaire.