Ecrit par Samantha Vinokor-Meinrath, traduit de l’Anglais par Faustine Goldberg-Sigal

 

A une période de montée de l’antisémitisme, où la droite comme la gauche semblent s’être réappropriées la haine ancestrale du peuple juif et l’avoir ramenée dans le XXIe siècle avec une vigueur impressionnante, la communauté juive est attaquée. Et, comme tout au long de l’histoire, le vieil adage de deux juifs, trois opinions, continue de se manifester. Mais à une époque où il est plus important que jamais pour les juifs de se tenir unis et de se soutenir mutuellement, je voudrais crever l’abcès de notre idiosyncrasie, et nous inviter tous à cesser la haine de soi (ndlt: Jew-shaming en anglais). 

Que signifie la haine de soi à l’ère de l’antisémitisme?

Quand chacun de nous a différentes manières de faire face à cette nouvelle réalité, la dernière chose dont nous ayons besoin et de dire à nos coreligionnaires qu’ils se trompent. Plutôt que de se renforcer mutuellement, trop d’entre nous se critiquent mutuellement pour ne pas réagir de la manière dont “il faudrait”.

Si quelqu’un réagit au fait que sa synagogue soit taggée de croix gammées en portant fièrement une magen david, ou met une hanukiah à sa fenêtre, ou se promène de manière générale comme un/e juif/ve visible, grand bien leur fasse. La dernière chose dont ils ont besoin est que leurs coreligionnaires leur fasse des regards de travers et demande: est-ce une bonne idée? Es-tu sûr que ça n’est pas risqué? 

Si la réponse à un coreligionnaire battu pour avoir parlé hébreu en public est de mettre sa casquette par dessus sa kippa, ou de laisser le tee-shirt de Tsahal au placard, ou de ne pas s’exclamer “mazal tov!” lorsqu’on entend une bonne nouvelle en public, ils répondent à une peur réelle et viscérale. La dernière chose dont ils ont besoin est que leurs coreligionnaires les accusent de céder aux antisémites, et d’être accusés d’être des juifs honteux. 

Si la réaction aux dernières nouvelles de brutalités subies par des juifs est de poster des messages de solidarité sur Facebook, tant mieux. Répondre en reprochant à l’auteur de disséminer la peur, ou d’ignorer les discriminations raciales, ou de créer une réalité dans laquelle les juifs ne se lient entre eux qu’autour des tragédies, ne fait que discréditer la réaction de quelqu’un et le/a contraindre au silence. D’un autre côté, si quelqu’un a publié sur Facebook le 8ème soir de Hanouca sur autre chose que l’attaque à Monsey, mais plutôt sur les cadeaux de leurs enfants, ou leur voyage familial, ou des latkes qu’ils ont mangées, leur répondre en jugeant qu’ils ignorent la communauté juive, ne sonnent pas l’alarme, et mettent la tête dans le sable, est aussi incroyablement contre-productif, et les rend encore moins susceptibles de s’impliquer plus tard. De manière générale, répondre par “vous n’avez qu’à déménager en Israël” est contre-productif et peu utile dans la réalité actuelle. 

La communauté juive est attaquée. Un point, c’est tout. Et nous, comme communauté, ne savons peut-être pas encore répondre efficacement. Mais je peux affirmer assez sûrement que la réponse n’est pas de nous frapper mutuellement lorsque nous sommes à terre. C’est une époque de peur, et nous nous réveillons chaque jour inquiets, en attente des alertes des nouvelles sur la prochaine attaque et priant que ce ne soit pas dans notre ville – et cela nous pèse quotidiennement, de manière différente pour chacun. Mais c’est le moment de se tenir ensemble, de se soutenir, et de ne pas être être si complaisants avec nos voix que nous réduisions les autres au silence. Nos propres textes nous disent de faire preuve de force et courage, et c’est à chacun de déterminer ce que cela signifie pour soi-même. Nous sommes ensemble. 

Samantha Vinokor-Meinrath est une éducatrice juive dont la passion est de travailler avec des ados et jeunes adultes juifs, pour parler d’Israël, d’histoire, de philanthropie, de nourriture – à travers des jeux aussi significatifs que possibles. Au quotidien, elle travaille avec la communauté juive de Cleveland et écrit une thèse en leadership éducationnel juif. Vous pouvez en lire plus sur son travail sur www.SamanthaVinokorMeinrath.com