Par Faustine Goldberg-Sigal
Difficile de passer à côté du sujet du Coronavirus ces jours-ci ! Les ramifications éducatives sont multiples entre cours et activités annulés et angoisse des parents pas forcément lisible par les enfants. Je vous propose quelques pistes d’éducation juive pour retourner cette contrainte en possibilités éducatives.
Donner du sens aux rituels de l’hygiène. L’OMS recommande des lavages de main fréquents et rigoureux pour se protéger. C’est le moment de remettre en perspective le rituel de netilat yadayim, le lavage des mains rituels au lever et avant les repas ou à la bénédiction d’asher yatsar que l’on fait habituellement en quittant les toilettes. Des idées de réflexion:
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- Netilat yadayim nous permet de nous souvenir du Grand Prêtre et du Temple, et ainsi de donner une profondeur historique et spirituelle à ce geste du quotidien. Si lui se préparait ainsi à approcher l’autel, cela nous rappelle que nos tables sont maintenant considérées comme des autels pour célébrer Dieu et nos grands moments.
- Netilat yadayim nous fait penser à l’hygiène au-delà de la stricte protection contre les microbes (on n’utilise traditionnellement pas de savon) : l’hygiène c’est aussi un rythme, des réflexes, une mise en condition mentale, etc. En plus, on peut aussi se servir de netilat yadayim pour penser à se laver les mains avec du savon avant!
- L’OMS recommande de chanter deux fois “Joyeux anniversaire” ou l’alphabet pour être sûr/e de se laver les mains assez longtemps. Rien n’empêche de chanter des chansons de Pourim deux fois à la place!
- Asher Yatsar parle du fonctionnement du corps comme une mécanique holistique, où plein d’engrenages oeuvrent à la santé globale. C’est le moment de parler à vos enfants de tous ces engrenages et de comment les protéger. Beaucoup de sources disent que la récitation intentionnelle de cette bénédiction amène une meilleure santé. Pourquoi? Magie? Ou peut-être une conscience accrue de la force et de la fragilité du corps humaine et de notre responsabilité de le protéger?
La protection de la santé comme impératif physique et spirituel. C’est aussi le moment de parler de la protection de sa santé, shmirat haguf, comme d’un impératif juif, d’une mitsva. Nos sages ont déduit du verset : “Seulement prends garde à toi, et garde soigneusement ton âme, afin que tu n’oublies point les choses que tes yeux ont vues, et afin que de tous les jours de ta vie elles ne sortent de ton cœur, mais que tu les enseignes à tes enfants, et aux enfants de tes enfants” (Deut. 4:9) que protéger son corps, “la maison de l’âme”, dans les mots de Philon d’Alexandrie, est un commandement. C’est un bon moment pour faire découvrir à vos enfants et/ou élèves la figure de Maïmonide aux multiples vies et talents – notamment comment il a mêlé ses savoirs juifs et médicaux. Dans les Hilchot Deot de son magistral Mishneh Torah, il livre de nombreuses recommandations de santé qui ne sont pas dissociables pour lui d’une vie au service des mitsvot, des commandements. On peut par exemple regarder tout le 4e chapitre avec les enfants et se demander si ce que Maïmonide est toujours fiable et si nous vivons conformément à ses principes.
On peut aussi raconter l’histoire suivante issue du Midrash Rabbah (Vayikra Rabbah 34:3), à propos du proverbe “Quiconque se fait du bien à soi-même est une personne pieuse” (Prov. 11:17). Un jour qu’Hillel l’Ancien avait pris congès de ses élèves, il les escorta finalement sur leur chemin. Ils lui demandèrent:
- Maître, où vas-tu?
- Je vais accomplir une mitsva, répondit-il.
- Quelle mitsva?
- Me baigner au bain!
- Est-ce une mitsva que de se baigner?
- Tout à fait! Les statues des rois sont nettoyées fréquemment par des gens nommés et rémunérés spécifiquement pour en prendre en soin. Ces gens sont même considérés comme des notables à la cour! Et moi, qui ai été créé à l’image de Dieu, je dois d’autant plus me nettoyer! Comme il est dit “A l’image de Dieu Il fit l’humain” (Genèse 9:6)
Ces textes et questions peuvent aider à se rappeler de l’importance de protéger la santé de son corps mais aussi de celui des autres. D’une manière plus optimiste, ils peuvent aussi servir à célébrer le miracle quotidien qu’est le fonctionnement du corps humain et sa résilience face aux attaques extérieures!
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