Par Faustine Goldberg-Sigal
Dans le cadre de mon travail de Directrice Internationale de l’Education Juive de Moishe House, l’une des choses les plus importantes sur lesquelles je travaille est la création et direction de Jewish Learning Retreats. En français, on traduirait cela par “Retraite d’Etudes Juives”. Sauf qu’à ma connaissance, en français lorsqu’on parle de retraite, on se réfère à une pratique catholique de séjour passé entre silence et prière. Avec cette image, nos retreats partagent l’idée de quitter son quotidien pour apprendre sur la religion – mais pas grand chose de plus.
Le silence caractérise rarement nos rencontres et la prière n’en est qu’une composante parmi d’autres. Pour nous, ce sont des rassemblement d’une trentaine de jeunes adultes du monde entier (dont la France, souvent!) qui viennent apprendre sur une fête juive, comme Pessah, à la fois des connaissances basiques et classiques et aussi des perspectives plus inhabituelles. Les connaissances sont partagées par l’équipe Moishe House, mais aussi un/e éducateur/rice invité (rabbin ou autre) et enfin par les participants eux-mêmes. Nous savons aussi que l’apprentissage se passe largement de manière informelle dans les conversations entre les sessions et nous veillons à ce que les moments de pauses, repas, ballades, sport, dégustation de vin, ateliers artistiques, etc. soient des opportunités fréquentes et riches. A Moishe House, l’ethos d’étude est que les connaissances puissent se transformer immédiatement en programmes. Nous échangeons des idées avec la question permanente des modalités dans lesquelles ces idées pour réunir des jeunes juifs et les inviter à devenir actifs dans leur vie juive. Les retreats sont donc en général des expériences immersives qui donnent aux gens le temps et l’espace d’apprendre, de grandir, de rencontrer et de construire. A travers les différentes organisations juives américaines, chaque année, des dizaines de milliers de juifs de tous âges et horizons y trouvent un espace éducatif. Ce nombre y dépasse désormais le nombre d’enfants participants à des colonies et camps juifs l’été.
La pratique du shabbaton existe dans les institutions juives françaises, éducatives ou autre mais elle n’est pas très développée. Dans le monde juif américain, les retreats prennent une part croissante de la stratégie éducative de certaines organisations et leur contenu éducatif est beaucoup plus important quantitativement et divers que ce dont j’ai pu faire l’expérience lors de shabbat pleins en France. Le Centre Maurice & Marilyn Cohen pour les études juives modernes de l’université américaine Brandeis vient de publier un rapport de recherche intitulé “Advancing Jewish Retreating”. Le rapport étudie notamment qui organise des retreats, pourquoi ils utilisent ce format et comment les retreats sont intégrés dans la vie de leur organisation. Je voudrais en traduire les grandes lignes pour permettre aux professionnels de l’éducation juive française de réfléchir si et comment cette pratique pourrait se développer en France.
- Les retraites ajoutent de la valeur au travail d’une organisation d’une manière qui ne serait pas possible par un autre vecteur. Elles sont un outils puissant pour accomplir l’organisation d’une mission, construire une communauté entre participants et dirigeants et dispensent de l’éducation juive informelle qui permet d’approfondir savoir et pratique juifs. Elles se fondent autant qu’elles approfondissent le travail annuel.
- Les objectifs les plus communs des retreats juives sont la construction de communauté, l’éducation juive, shabbat ou d’autres fêtes et la spiritualité. Une partie de la force du modèle de la retreat repose dans leur capacité à accomplir plusieurs objectifs.
- Les retreats sont un outils naturel pour des micro-communautés parce qu’elles offrent des expériences intenses pour des petits groupes d’individus partageant des intérêts et besoins. Elles sont particulièrement adaptée pour la génération dite millenial (née entre 1981 et 1996).
- Les retreats juives sont un domaine de croissance tant pour les organisateurs que les opérateurs. Les organisateurs proposent de plus en plus de retreats à de plus en plus de participants, dans de plus en plus de lieux et sur de plus en plus de sujets. Les centres de retreats juifs ont quant à eux vu leur chiffre d’affaire s’accroître remarquablement, par leur clientèle juive mais aussi non-juive.
- Le domaine des retreats juives a besoin de structures propres à en promouvoir la pertinence, l’améliorer et partager des connaissances pour approfondir le professionnalisme et l’expertise.
- Le financement est un aspect clé du développement du domaine pour le développement des compétences et fournir des bourses pour rendre les retreats accessibles au plus grand nombre.
- De la recherche supplémentaire peut ajouter à la force des retreats en améliorant leur impact.
Le rapport complet ainsi que son executive summary sont accessibles gratuitement en cliquant ici.
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